• Monument hommage aux Martiniquais morts pour la France lors de la Première Guerre Mondiale

    La Martinique durant la Première Guerre Mondiale

    La Première Guerre mondiale éclate alors que la Martinique reste marquée par deux événements majeurs : l’abolition de l’esclavage et l’éruption de la Montagne Pelée. Saint-Pierre, autrefois capitale, a cédé sa place à Fort-de-France, tandis que l’île demeure très rurale. L’économie, centrée sur la canne à sucre, souffre de la crise sucrière en Europe, mais cette culture couvre encore la majorité des terres agricoles. La situation politique est également fragile. Cette étude retrace la vie en Martinique durant la Grande Guerre.

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La Première Guerre Mondiale arrive dans un contexte de grand chamboulement politique et économique en Martinique. Encore marquée par l'éruption de la Montagne Pelée qui avait fait près de 32 000 victimes et vu sa capitale, Saint-Pierre, détruite, Fort-de-France devint le chef-lieu de l'île. Elle avait dû accueillir les nombreux sinistrés et assurer la continuité économique.

La Martinique en pleine mutation

Un contexte social tendu

L'île était peuplée alors de 184 004 habitants d'après le recensement d'octobre 1910. Dix ans plus tôt, l'île avait été frappée par diverses grèves générales et mouvements sociaux. La canne à sucre représentait la première activité économique. Le sucre de canne colonial affrontait une forte concurrence de celui fabriqué à base de betteraves et les colonies antillaises françaises n'étaient plus que des producteurs de sucre d'appoint. À l'époque, l'industrie sucrière était le premier secteur d'emploi en Martinique.

Les 7 et 8 janvier 1900 des ouvriers agricoles travaillant dans les plantations de canne à sucre du Nord Atlantique se mettent en grève pour réclamer une revalorisation salariale suite à une forte baisse de leur pouvoir d'achat. Insatisfait des solutions proposées par le patronat, s'ensuit une grève générale en février 1900.

Ce premier fort mouvement social a été baptisé « Fourmies colonial » du fait de son ampleur et de son caractère meurtrier.

Le 2 février 1900, la tension remontait d'un cran et à partir du 5, s'étend dans diverses communes : Marigot, Sainte-Marie, Le Lorrain, Le Lamentin, Trinité, Basse-Pointe et Le Robert.

Le 8 février, les grévistes font front devant l'usine du François à des gendarmes qui tirent tuant dix grévistes et en blessant douze autres. Cette manifestation s'achevait dans un bain de sang et eut un retentissement international.

Les besoins de sucre de canne s'amenuisèrent face à la production de sucre de betteraves et il fallait attendre 1908 pour que les sucriers martiniquais retrouvent le sourire avec un regain de demande de sucre de canne et de son coût. Cela allait enfoncer la Martinique dans la monoculture, ce qui justement avait été son point faible jusque-là. La prise de conscience aurait lieu cependant et la Martinique allait se mettre à produire de l'ananas et de la banane voués à l'exportation.

Une nouvelle grève générale allait frapper l'île en 1905 mais serait beaucoup plus courte. Les ouvriers entendaient mettre la pression sur le patronat cette fois avec l'aide de syndicats d'ouvriers de la canne à sucre.

Le syndicalisme des ouvriers de la canne à sucre allait arriver en 1900, mais l'ancrage communal de ces derniers serait fortement pénalisant. Plus organisés, les syndicats foyalais « professionnels » de la métallurgie, du bâtiment, les typographes ou encore les cordonniers, étiquetés socialistes, allaient contribuer à répandre la parole socialiste dans l'île.